Rico ou une enfance à la guadeloupéenne

ndlr: cet article est une version modifiée d’un article publié pour la première fois sur myinsaeng.com le 9 avril 2017.


Il m’a fallu du temps pour trouver une oeuvre pour cette rubrique. J’avais déjà pensé à Rico, mais j’étais un peu réticente. Sachant toute la hype qu’il y a eu autour (récompensé et sélectionné dans plusieurs festivals), et sachant que j’ai tendance à toujours me trouver dans la minorité quand il s’agit de donner un avis sur les films et les séries (genre la fille qui shippe toujours le couple à ne pas shipper, c’est moi), je n’aurais pas aimé ne pas l’aimer. Et puis le film n’était dispo qu’en ligne et vous savez que les paiements en ligne et moi… mais bon. Parfois, il faut vaincre ses peurs. Je suis bien contente de l’avoir fait.

L’histoire

Agé de 10 ans, Lucius est un petit garçon issu d'une famille modeste des Antilles. A l’approche des fêtes de Noël, le petit garçon surprend une conversation de ses parents qui projettent pour le Réveillon, de tuer Rico, son cochon. Lucius, fort attaché à lui, va tout essayer pour empêcher ce sacrifice traditionnel.

De la nostalgie

Lucius, dit Tilulu, fait tout pour empêcher que son cochon Rico passe à la casserole familiale pendant le repas de Noël. Quand je regarde un film caribéen dans un genre familial, j’attends toujours cette seconde de basculement qui me fait dire “je suis à la maison” et ça joue essentiellement pour déterminer si j’aime ou pas. C’est peut-être injuste envers les cinéastes, mais c’est mon droit égoïste de téléspectatrice. Pour moi, c’est ce qui constitue l’âme du film. Dès la première seconde, Rico m’a transportée direct sur le morne où vivait ma grand-mère. Mon moi de 10 ans aurait aimé domestiquer le porcelet gris et rose qui vivait en liberté. (Parenthèse : pour ceux qui n’ont jamais couru après un porcelet, laissez-moi vous dire que ça court hyper vite et ça pèse beaucoup.) Tilulu a réussi là où j’ai brillamment échoué. Je m’incline.

De l’intemporalité

Les années 80, 90 voire début 2000 ? Il est assez difficile de dater précisément l’époque où se situe l’histoire, ce qui montre la qualité de la lokalisation. Que ce soit la musique, les maisons, les objets, les boissons, le créole, les références culturelles parlent encore à toutes les générations. A part les tenues d’Eugène, Lynda D’Alexis n’utilise que des éléments intemporels pour créer l’ambiance guadeloupéenne. Je m’interroge d’autant plus sur ce que les enfants des années 2000 nous proposeront à voir dans une vingtaine d’années à travers leurs souvenirs.

En une quinzaine de minutes, le film nous offre un florilège d’enjeux importants de la représentation du vécu dans la Caraïbe comme la vie à la campagne, les traditions culinaires, les célébrations religieuses, le rapport enfant-parents, le rapport aux voisins, et le rapport au créole.

Honnêtement, je pourrais chipoter sur certains aspects, mais j’ai tellement aimé Rico que je peux passer outre et juste apprécier ces quelques minutes chaleureuses de divertissement. Je finirai sur la question technique. La clarté des images, du son (le son est AU TOP), et même le générique de fin, chaque détail a été mis au service de l’histoire. Et même si je n’avais pas aimé l’intrigue, rien que pour l’effort technique, j’aurais applaudi.

Rico était disponible en visionnage pour 3,99 euros sur Vimeo à l’époque où je l’avais regardé il y a environ 2 ans. Le 30 mars 2020, Lynda D’Alexis l’a mis en ligne sur Youtube dans son intégralité. Allez vite le regarder ! Do it for the culture.