[Focus Karayib] Stevy Mahy, une Renaissance Woman caribéenne du 21ème siècle

En ce mois d’octobre 2020, je veux mettre à l’honneur Stevy Mahy pour le deuxième focus Karayib de Karukerament.com. Entrepreneuse, autrice, réalisatrice, elle est avant tout une chanteuse caribéenne qui transcende les styles et les genres telle une créatrice du 21ème siècle.

S comme sensibilité

J’ai découvert Stevy Mahy en faisant des recherches pour mon dossier sur les représentations de l’esclavage dans la musique. Au-delà du charme de sa voix portée par le genre d’arrangement guitare acoustique que j’affectionne, ce sont les paroles de son single “Haïti Chérie” qui m’ont frappée lors des premières écoutes. Ma mémoire me joue peut-être des tours, mais j’ai réellement l’impression que c’est la première fois que j’entendais le nom Haïti prononcé avec douceur et avec amour. Je ne peux pas dire avoir un souvenir précis de cette xénophobie irrationnelle que certain.e.s Guadeloupéen.nes exprimaient ouvertement envers les Haïtiens… mais je sais que cette xénophobie était réelle et me déstabilisait d’une façon que mon moi enfant ne savait pas encore verbaliser. La sensibilité avec laquelle Stevy Mahy chantait cette ode à une île soeur m’a touchée d’autant plus par la singularité de ce discours artistique que je n’avais jamais entendu.

T comme Timbre

Je suis fan des voix rauques, celles qui cassent légèrement en fin de phrase, celles qui transmettent une énergie chaleureuse même en chuchotant. Je sais qu’il existe d’autres chanteuses caribéennes avec cette particularité mais son timbre à elle fait vibrer mes émotions d’une manière différente.

E comme élégance

J’apprécie le style folk. D’ailleurs, les chansons coréennes qui m’ont le plus émues sont des chansons folk. Cela ne m’empêche pas de trouver ce style ennuyeux à la longue. Mais je ne m’en lasse pas quand il est mêlé à des tambours traditionnels… Et même quand les tambours sont absents, sa voix à elle continue de transmettre une énergie pleine d’élégance.

V comme vulnérabilité

L’amour, c’est la vie. La vie, c’est l’amour. Thème de prédilection des artistes. Et je crois à ce message le temps de la chanson avant de retourner à mon cynisme habituel. Dans son premier album “The Beautiful Side of a Kréyol Trip” (2010), Stevy Mahy chante les facettes de l’amour porté à l’autre. Dans “Renaissance Woman” (2016), elle met son âme à nu dans la mise en musique d’une vulnérabilité qu’elle assume pour partager sa quête d’elle-même. Cet album concept est d’autant plus intéressant que l’expérience artistique peut se compléter par la lecture d’un journal intime essai. À l’heure des réseaux sociaux et de la culture de l’immédiat, multiplier les approches en demandant au public de prendre du temps pour s’imprégner de l’œuvre permet de s’inscrire dans la longévité.

Y comme yeux

L’autre atout de Stevy Mahy est sa capacité d’interprétation. L’émotion qu’elle transmet se reflète aussi dans son regard. Elle me donne l’impression de chercher la connexion avec l’âme de la personne qui écoute, de se confier sans pour autant s’imposer d’autorité. Son regard sur la vie, sa vision de la femme qu’elle est, qu’elle veut être… Elle partage son cheminement avec nous et nous offre la possibilité de découvrir notre propre cheminement pour nous accomplir. C’est comme si Stevy Mahy était d’une autre époque… du passé ou du futur. Je n’arrive pas à le déterminer. Peut-être que ça change d’une chanson à l’autre. Et pourtant sa musique reste bien ancrée dans notre présent, transcende les genres pour créer une harmonie qui peut surmonter n’importe quelle frontière. Son art valorise la femme caribéenne du 21ème siècle dans ses forces, ses doutes et sa résilience.

J’en suis arrivée à cette conclusion en regardant le clip-vidéo de “Tout Ce Que Tu Es”, un duo avec LS et son plus récent single à ce jour et qui fera l’objet d’un Focus et d’une interview exclusive.

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Ndlr : ceci est une version actualisée de mon article publié sur myinsaeng.com le 23 octobre 2019.